Le Premier ministre de la Barbade appelle à un nouveau paradigme financier mondial qui soit équitable pour tous

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WASHINGTON D.C., États-Unis d’Amérique, 20 octobre 2022/ — L’architecture financière mondiale doit être entièrement reconfigurée pour refléter  la participation et les besoins des pays du Sud, dont beaucoup étaient sous le joug du colonialisme à l’époque où l’ordre actuel a été façonné, a déclaré  Mia Amor Mottley, Premier ministre de la Barbade, lors de la sixième conférence annuelle Babacar Ndiaye, organisée en marge des assemblées annuelles de la Banque mondiale et du FMI à Washington DC, aux États-Unis.

La conference  “Le monde en développement dans une architecture financière mondiale turbulente” est organisée par la Banque africaine d’import-export (Afreximbank). Dans son allocution de bienvenue, le professeur Benedict Oramah, président d’Afreximbank, a salué l’héritage durable et la vision du Dr Ndiaye et a appelé à “redoubler d’efforts pour reconnecter l’Afrique et les Caraïbes par le biais du commerce et de l’investissement dans la poursuite de l’objectif commun d’émancipation économique”.

Le Président Oramah a fait l’éloge du Premier ministre Mottley pour son leadership mondial dans la poursuite de l’équité et de l’égalité. Il a évoqué leur conviction commune que “les nations d’Afrique et des Caraïbes peuvent transformer les iniquités de l’histoire en plates-formes de prospérité économique, aujourd’hui et à l’avenir. La réalisation de cette vision ne peut commencer que par la reconnexion du peuple caribéen à ses liens généalogiques en Afrique par le biais du commerce et de l’investissement”.

La conférence s’est tenue à un moment où les tensions géopolitiques s’intensifient, exacerbant les risques de fragmentation mondiale. Parallèlement, le cycle – d’importance systémique –  de hausse agressive des taux d’intérêt par les banques centrales en réponse à l’inflation galopante a aggravé les problèmes de gestion macroéconomique. Ce qui a augmenté considérablement les coûts du service de la dette et fait planer le spectre d’une crise de la dette dans les pays du Sud.

Le Premier ministre Mottley a déclaré que le système actuel fonctionne au détriment des nations des Caraïbes et de l’Afrique, dont les circonstances uniques ne sont pas prises en compte dans les décisions des grandes institutions financières, alors qu’elles sont durement affectées par ces décisions. Rappelant la genèse des institutions de Bretton Woods, elle a déclaré qu’elles avaient été conçues à une époque où “nous n’étions pas vus, nous n’étions pas entendus et nous n’étions pas ressentis”. Ces structures doivent être réorientées par souci d’équité et pour refléter le rôle croissant que jouent les pays du Sud dans l’économie mondiale.

Elle a déclaré que les institutions mondiales doivent se rappeler leurs mandats fondateurs et chercher à remplir leur objectif initial d’une manière qui profite à tous les pays, mais surtout aux pays à revenu faible et intermédiaire, qui sont actuellement confrontés à de graves difficultés. Le Premier ministre Mottley a présenté une série de recommandations visant à réformer l’actuel système financier international  afin de mieux refléter les défis de notre époque tout en créant les conditions d’un processus de mondialisation au service de tous. Elle a formulé les  recommandations  pertinentes  suivantes :

Réformer le Conseil de sécurité des Nations unies, en particulier son groupe de membres permanents, qui ne représente absolument pas les 1,5 milliard de personnes d’origine africaine ;

Démocratiser le système de gouvernance mondiale, notamment le G7 et le G20, en élargissant la représentation pour inclure l’Union africaine en tant que membre à part entière ;

Réaffecter les droits de tirage spéciaux (DTS) inutilisés émis par le FMI afin d’atténuer les contraintes de liquidité dans les pays du Sud ;

Développer de nouvelles facilités pour l’alimentation, l’agriculture, l’énergie propre et l’adaptation au changement climatique en réponse aux nouveaux défis mondiaux ;

Le plafonnement du service de la dette à un certain pourcentage des exportations, par exemple à environ 5 % des exportations totales, comme cela a été fait en Allemagne pour aider à financer la reconstruction après la Seconde Guerre mondiale. Les paiements du service de la dette ont atteint respectivement 24% et 20% des exportations en Afrique et dans les Caraïbes;

Réformer les agences mondiales de notation du crédit pour corriger leurs biais intrinsèques qui, au fil des ans, ont conduit les investisseurs mondiaux à surévaluer les risques dans les pays du Sud, avec des conséquences importantes pour l’accès au financement du développement, la viabilité de la dette et la croissance économique. Pour ne prendre qu’un exemple, le rendement des euro-obligations du Ghana dépasse actuellement 25 %, tandis que la Grèce paie moins de 2 % pour les nouvelles émissions ;

Suspendre les surcharges temporaires du FMI, qui alourdissent encore le fardeau de la dette à un moment où la hausse des taux d’intérêt exacerbe l’incidence budgétaire de la dette souveraine ;

Profiter de la révision des quotes-parts du FMI prévue en 2023 pour réformer les institutions de Bretton Woods et tenir compte de l’évolution des poids économiques des régions. Le Premier ministre a déploré le fait que 27 pays à faible revenu, avec une population de 611 millions d’habitants, ont moins de quotes-parts que le Royaume-Uni, avec une population de seulement 67 millions d’habitants ;

Augmenter le financement à long terme et les prêts à plus longue échéance pour soutenir le développement économique et la transformation structurelle des pays à faible revenu. Pour souligner les avantages du financement à long terme, le Premier ministre a cité l’exemple de la Grande-Bretagne, où une obligation émise en 1922 pour la reconstruction après la première guerre mondiale n’a finalement été remboursée qu’en 2014, soit près d’un siècle plus tard ;

Réformer les institutions de Bretton Woods et les tenir responsables de leur mandat, en particulier celui du développement et pas seulement de la gestion des crises et de l’ajustement structurel. Le Premier ministre a rappelé à l’auditoire que ce que nous appelons aujourd’hui le Groupe de la Banque mondiale a débuté sous le nom de Banque internationale pour la reconstruction et le développement. Elle a souligné que son mandat éponyme, qui a été si efficace lors de la reconstruction de l’Europe après la Seconde Guerre mondiale, a été sensiblement moins exercé en ce qui concerne la promotion du développement dans le Sud, où la pauvreté est endémique et où les taux de chômage ont atteint les niveaux de la Grande Dépression pendant des décennies.

Le Premier ministre Mottley a souligné la nécessité d’adopter un sentiment d’urgence, faisant valoir que les effets dévastateurs du réchauffement de la planète –  en particulier dans les pays qui font face en première ligne aux  crises climatiques, énergétiques et alimentaires – exigent des mesures plus audacieuses et plus rapides. “Une action urgente et ambitieuse est nécessaire pour sauver des vies et des moyens de subsistance”, a-t-elle déclaré.

Elle a également demandé aux pays d’Afrique et des Caraïbes de renforcer leurs propres capacités en établissant des liens  qui leur permettront de financer et d’exécuter des projets. Dans ce contexte, elle a félicité Afreximbank pour avoir  organisé le premier Forum Afri-Caraïbes sur le commerce et l’investissement, qui, selon elle, a permis de jeter ces ponts. “La présence de banques caribéennes en Afrique et de banques africaines dans les Caraïbes est un exemple de la manière dont les liens économiques peuvent être construits et cimentés”, a-t-elle déclaré. Le Premier ministre a également fait l’éloge du président Oramah pour sa vision panafricaine, qui reconnaît que la prospérité mondiale des Africains doit inclure non seulement le continent africain mais aussi sa diaspora.

En outre, le Premier ministre a souligné les avantages liés à l’émergence de la numérisation et des nouvelles technologies, notamment en termes de développement économique et de prospérité partagée entre l’Afrique et sa diaspora. À cet égard, elle a encouragé les dirigeants d’Afrique et des Caraïbes à préparer les jeunes Africains aux défis croissants du développement en investissant dans l’intelligence artificielle, les technologies de l’information, la cybersécurité et la numérisation. “Nous devons cesser de regarder vers le Nord, car nous avons les capacities chez nous”, a-t-elle déclaré.

“La technologie est devenue le principal moteur de la croissance et de l’intégration effective dans l’économie mondiale. Investir dans notre jeunesse est non seulement une voie vers le renforcement de l’appropriation de notre processus de développement, mais aussi un moyen de récolter les bénéfices de la mondialisation “, a déclaré le Dr Hippolyte Fofack, économiste en chef d’Afreximbank, dans son discours de clôture. Le Dr Fofack a remercié et loué le Premier ministre pour son leadership sur le sujet de la réforme du système financier international, qui a trop longtemps sapé le processus de convergence mondiale des revenus et entretenu la dichotomie colonialiste entre pays développés et pays en développement en limitant l’accès aux capitaux dans le Sud.

Le Dr Fofack a également insisté sur le fait que l’émergence d’un système financier international amélioré, tel qu’énoncé par le Premier ministre, doit être le résultat d’un effort collectif, le succès nécessitant le soutien de toutes les parties prenantes. Il a invité les dirigeants mondiaux – du Sud et du Nord, ainsi que des secteurs public et privé – à collaborer pour mettre en œuvre les recommandations détaillées présentées par le Premier ministre Mottley afin de relever les défis communs du XXIe siècle. Distribué par APO Group pour Afreximbank.



À propos de la conférence et d’Afreximbank :
Afreximbank organise cette Conférence chaque année depuis 2017 en l’honneur de feu Dr Babacar Ndiaye, le cinquième président de la Banque africaine de développement. Le Dr Ndiaye a transformé la Banque au cours de sa décennie de leadership et a également contribué à la création de plusieurs autres institutions panafricaines durables, dont, entre autres, Afreximbank, Shelter Afrique et l’African Business Roundtable.

La Banque africaine d’import-export (Afreximbank) est une institution financière multilatérale panafricaine dont le mandat est de financer et de promouvoir le commerce intra et extra-africain. Afreximbank déploie des structures innovantes pour fournir des solutions de financement qui soutiennent la transformation de la structure du commerce africain, accélérant l’industrialisation et le commerce intra-régional, stimulant ainsi l’expansion économique en Afrique. Fervent défenseur de l’Accord de libre-échange continental africain (AfCFTA), Afreximbank a lancé un Système panafricain de paiement et de règlement (PAPSS) qui a été adopté par l’Union africaine (UA) comme plateforme de paiement et de règlement pour soutenir la mise en œuvre de l’AfCFTA. Afreximbank travaille avec l’UA et le Secrétariat de l’AfCFTA pour développer une Facilité d’Ajustement afin d’aider les pays à participer efficacement à l’AfCFTA. À la fin de 2021, le total des actifs et des garanties de la Banque s’élevait à environ 25 milliards de dollars US, et ses fonds d’actionnaires à 4 milliards de dollars US. Afreximbank a déboursé plus de 51 milliards de dollars américains entre 2016 et 2021. La Banque bénéficie de notations attribuées par GCR (échelle internationale) (A), Moody’s (Baa1), l’Agence japonaise de notation du crédit (JCR) (A-) et Fitch (BBB). Le siège de la Banque est situé au Caire, en Égypte.


Contact média :
Amadou Labba Sall,
asall@afreximbank.com