Revitaliser l’économie africaine dans le sillage de la crise Russie-Ukraine

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La crise russo-ukrainienne a fortement mis à mal la reprise post-pandémique amorcée par l’Afrique. Cette situation a été exacerbée par les sanctions économiques et financières imposées par l’Occident à la Russie, qui ont aggravé les goulets d’étranglement de la chaîne d’approvisionnement et les pressions inflationnistes.

L’aggravation des tensions géopolitiques et la perturbation des routes commerciales ont fait grimper les prix des produits de base, entraîné des pénuries alimentaires et accru le risque de stagflation et de tensions sociales dans les pays les plus vulnérables. Et même si l’Afrique ne représente que trois à quatre pour cent de la consommation mondiale d’engrais, le Cameroun, le Ghana et la Côte d’Ivoire, selon les Nations unies, figurent parmi les pays les plus vulnérables et dépendent fortement des approvisionnements russes.

C’est ce qui a été dit lors de la deuxième session plénière des Assemblées annuelles 2022 d’Afreximbank, où des dirigeants d’Afrique et des secteurs financiers et économiques internationaux ont discuté du thème « Implications de la crise ukrainienne pour les économies et le commerce africains ».

Les experts financiers de renom participant à la table-ronde comprenaient Dr Donald Kaberuka, Président du Conseil d’administration de SouthBridge Group et ancien Président de la Banque africaine de développement (BAD), S.E M. Tarek Hassan Amer, Gouverneur de la Banque centrale d’Égypte, Dr. Papa N’Diaye, Chef de la Division des études régionales du département Afrique du FMI, M. Samaila Zubairu, Président et directeur général de l’Africa Finance Corporation (AFC) et S.E. Dr. Denny Kalyalyalya, Gouverneur de la Banque de Zambie (République de Zambie). Les experts ont convenu que pour que les pays africains puissent résister aux chocs et aux crises externes, il est essentiel de planifier à l’avance afin de protéger l’économie africaine et la communauté locale.

Compte tenu de l’importance de la Russie et de l’Ukraine en tant que sources mondiales de pétrole brut et de gaz, de matières premières et de céréales, la crise a eu des répercussions négatives sur les économies africaines, en particulier celles qui dépendent fortement des importations de céréales, d’engrais et de carburant. L’Égypte, par exemple, importe plus de blé d’Ukraine que toute autre nation au monde, avec une part de 14 % des exportations totales de blé de l’Ukraine.

Dans son allocution d’ouverture, le Dr Donald Kaberuka, Président et Associé directeur de SouthBridge Group, a déclaré : « La planification à long terme est un élément essentiel de la gestion de crise. L’élaboration d’une politique économique ne consiste pas à éviter les crises mais à être prêt à les gérer lorsqu’elles apparaissent. Pendant que nous nous concentrons sur la crise actuelle, nous devons rester conscients des lignes de faille structurelles de nos systèmes économiques et anticiper sur l’avenir. Nous devons donner aux institutions africaines la capacité de résister aux tempêtes futures ».

Afreximbank a, pour sa part, relevé le défi, en aidant les pays membres à gérer les répercussions de la crise ukrainienne sur les économies et les entreprises régionales. En mars 2022, Afreximbank a approuvé le lancement d’un programme de financement du commerce pour l’ajustement à la crise ukrainienne en Afrique (UKAFPA), doté de 4 milliards de dollars.

Le programme visait à aider les pays africains à faire face aux flambées immédiates des prix à l’importation en attendant les ajustements de la demande intérieure ; à refinancer les prêts surdimensionnés dans le contexte des prix élevés actuels du pétrole et des métaux, et à libérer ainsi des liquidités pour répondre à d’autres besoins urgents, tels que les importations de denrées alimentaires et d’engrais et le service du coût croissant de la dette ; à aider les pays et les entreprises à structurer et à conclure des contrats dérivés aux prix élevés actuels des matières premières et à stabiliser les recettes d’exportation futures ; à étendre le soutien financier aux banques centrales des économies dépendantes du tourisme afin de couvrir les déficits de recettes en devises résultant d’une baisse des arrivées de touristes en provenance de Russie et d’Ukraine et d’accélérer l’achèvement de projets d’exportation importants en améliorant l’accès aux devises étrangères pour l’importation d’équipements, de technologies et de savoir-faire essentiels à l’achèvement des projets.

Il a été convenu au cours des discussions que la collaboration avec les banques et les institutions partenaires pour répondre d’urgence aux besoins des pays africains garantira une sécurité alimentaire stable et dynamique, un approvisionnement adéquat en carburant et évitera les pénuries d’engrais et d’intrants agricoles.

Le panel a fait remarquer que la crise russo-ukrainienne a néanmoins eu des incidences importantes sur l’économie mondiale avec le risque de faire reculer de plusieurs décennies la croissance économique de l’Afrique. Toutefois, dans son allocution de clôture, S.E. M. Tarek Hassan Amer, Gouverneur de la Banque centrale d’Égypte, a souligné: « Si nous voulons véritablement nous regrouper en tant que pays africains, dans le cadre d’accords commerciaux, d’unions monétaires et d’autres collaborations, nous devons donner à nos banques centrales l’indépendance dont elles ont besoin. C’est l’appel que je lance aux Présidents africains. Les banques centrales sont l’épine dorsale de la stabilité financière de l’Afrique, de l’inflation et de la communauté au sens large ».